Le
Grabuge
Le
Grabuge est un jeu de cartes familial en vogue au XIXe siècle et pratiqué
jusqu'au début du XXe. Il est cité par des auteurs tels que George Sand
et André Gide,
pourtant il n'apparaît que rarement dans les recueils de règles de
jeux. Il peut se décrire comme une réussite à deux joueurs,
où chacun tente de gagner le plus de paquets paquet,
au Grabuge, a plusieurs significations.
La
Crapette, bien connue de nos jours, semble être une complication du Grabuge. Jean
Tilly, après avoir publié en 1885 un Petit Traité du jeu de Bésigue,
suivi des règles du jeu de Grabuge, fait paraître en 1893 un petit livre
intitulé Quick, Crapette, J'en doute, et quelques autres nouveaux jeux de cartes.
Dans
le Grand Mémento encyclopédique Larousse, de 1937, la Crapette
est aussi appelée Dispute.
1.
Nombre de joueurs et jeu de cartes
Le
Grabuge se joue entre deux joueurs avec deux jeux de 52 cartes. Il peut aussi
se jouer avec quatre jeux, et certains le jouaient avec six et même huit
jeux. Les règles présentées ici, sont pour deux jeux, mais
l'augmentation du nombre de jeux ne change rien fondamentalement si ce n'est la
durée de la partie.
2.
Préparation du jeu de cartes, le talon
Un
joueur rassemble les deux jeux, les mélange, et en fait deux paquets à peu près
égaux, faces cachées. Il en garde un pour lui et donne l'autre à son vis-à-vis.
Chacun des deux joueurs prend son paquet en main, et place, une à une, les
cartes faces cachées alternativement à sa droite et à sa gauche il
faut impérativement commencer par la droite. Chacun, ayant désormais deux paquets
devant lui, donne à l'autre celui placé à sa droite. Au final, chacun des joueurs,
ayant réuni le paquet reçu du vis-à-vis et celui qui restait à sa gauche, a devant
lui un paquet de 52 cartes. Cette méthode a le double avantage de partager les
cartes équitablement entre les deux joueurs sans avoir à les compter, tout en
les mêlant bien.
Après l'avoir battu, chaque joueur donne son
paquet de 52 cartes à couper à son vis-à-vis, et le place reconstitué à
sa gauche. Il est alors appelé talon. Chacun des deux joueurs a
son talon.
3.
Constitution du grabuge
Chaque
joueur tire 8 cartes du dessus de son talon, une à une, les plaçant en
un paquet à sa droite, faces cachées. Ce paquet est appelé grabuge.
Puis les joueurs retournent la carte du dessus de leur grabuge en l'y replaçant
face visible.
4.
But du jeu, les paquets
Le
but du jeu est de gagner un maximum de paquets. Il existe deux types de
paquets et un autre virtuel :
- Un paquet est constitué de 13 cartes
classés en ordre ascendant depuis l'as jusqu'au roi. L'as est à la base du paquet
et le roi au sommet. La couleur (pique, cœur, carreau, trèfle) n'est pas prise
en compte (par exemple, un quatre de pique peut être placé sur un trois de trèfle).
Un tel paquet est monté au milieu de la table, successivement par les deux joueurs,
lorsqu'ils possèdent dans leur jeu une ou plusieurs cartes directement supérieures
à celles du dessus des paquets débutés. Cependant, un paquet ne peut pas être
commencé autrement que par un as. Comme on utilise deux jeux de 52 cartes, le
nombre potentiel de paquets est donc de huit. Pour gagner un paquet du milieu
de table (milieu de table que l'on appellera tableau), il faut le terminer
en y posant un roi. Peu importe le nombre de cartes placées par un joueur dans
un paquet, seul le couronnement du paquet par un roi en détermine son propriétaire.
Lorsqu'un joueur gagne ainsi un paquet, il le retire du tableau et le place à
sa gauche.
- On appelle aussi paquet, un groupe de cinq cartes
non jouées (jouer une carte, c'est la placer dans le tableau), lorsque plus aucun
des deux joueurs n'est en mesure d'en placer au tableau, ce qui détermine la fin
de la partie. Chacun des deux joueurs compte alors le nombre de cartes qu'il n'a
pu placer au tableau, et l'on fait la différence des comptes des deux joueurs.
On divise cette différence par cinq, et la partie entière du résultat donne le
nombre de paquets que celui à qui il restait le moins de cartes a gagné. Par exemple,
il reste 13 cartes à Pierre, et Paul en a 4 : la différence est de 9 cartes en
faveur de Paul, soit 5 + 4 cartes ; Paul gagne un paquet, les quatre cartes restantes
ne comptent pas.
À la fin de la partie, on fait, pour chaque
joueur, le total des paquets gagnés. Celui qui en a le plus grand nombre gagne
la partie. Dans notre exemple, si Pierre a gagné trois paquets du tableau, et
Paul un seul, au bilan Pierre aura trois paquets et Paul deux (un du tableau +
un des cartes non jouées). Pierre a gagné la partie avec un écart d'un paquet.
Il existe, une troisième manière de gagner un supplément forfaitaire
de deux paquets, qui est liée à l'épuisement sous condition du grabuge. Ces deux
paquets virtuels s'ajoutent au bilan du joueur considéré. Un seul des deux joueurs
peut en bénéficier, mais souvent aucun d'entre eux n'en profite (voir
ici).
5.
Primauté
Le
premier en cartes celui qui jouera en premier , est
celui qui a sur son grabuge la retourne la plus haute des deux : l'as est
la plus petite, le roi la plus haute.
Cependant, si un joueur possède
un as sur son grabuge, il doit le placer face visible au tableau pour en faire
la base d'un paquet. Puis, il retourne la carte suivante de son grabuge qui, si
elle n'est pas un autre as il serait placé à côté du premier, pour
être la base d'un deuxième paquet, et on retournerait la carte suivante ,
décidera par sa hauteur de la primauté.
6.
Configuration du jeu au début
Chaque
joueur a son grabuge à sa droite et son talon à sa gauche. Le cas échéant, un
ou plusieurs as sont placés au milieu de la table (tableau), constituant autant
de bases de paquets.
7.
Déroulement du jeu
Le
premier en cartes doit, si la carte retournée du grabuge est un deux, alors qu'un
as est au tableau, placer ce deux sur l'as, et immédiatement retourner la carte
suivante du grabuge. Si celle-ci peut être ajoutée au tableau un as
débutera un nouveau paquet, un deux ira sur un as, un trois sur un deux ,
le joueur doit le faire, et ainsi de suite tant que les cartes du grabuge peuvent
être ajoutées au tableau, soit sur un paquet débuté, soit si c'est un as pour
servir de base à un nouveau paquet.
Lorsqu'il ne peut pas, ou ne peut
plus, jouer depuis le grabuge, le joueur tire les quatre cartes du dessus de son
talon, faces cachées. Il en retourne la première, et :
- si elle peut
trouver une place au tableau, il doit l'y jouer. Il se peut que, dans ce cas,
la carte retournée du grabuge puisse prendre place dessus la dernière jouée, et
le joueur doit alors l'y placer, puis retourner la nouvelle carte du dessus du
grabuge. Le grabuge a priorité sur les cartes du talon. Tant qu'il est possible
de jouer ainsi des cartes du grabuge, il faut les jouer.
- si elle ne
peut pas trouver une place au tableau, il doit la placer devant lui face visible.
Les cartes qui seront ainsi placées devant lui, au cours de la partie, constitueront
sa réserve.
Puis, il retourne la deuxième des quatre cartes, qu'il place
si possible au tableau. Il procède comme précédemment pour le grabuge, qui est
toujours prioritaire. Dans le cas où il ne peut pas, ou ne peut plus utiliser
le grabuge, il doit utiliser si possible sa réserve. Une carte jouée depuis la
réserve, peut donner la possibilité d'utiliser le grabuge. Autrement dit, à son
tour, un joueur doit toujours donner la priorité à son grabuge.
Ne pouvant
plus jouer depuis son grabuge ou sa réserve, le joueur procède de la même manière
avec la troisième carte prise du talon, et termine avec la quatrième.
8.
Constitution de la réserve
Lorsqu'un
joueur ne peut pas jouer une des quatre cartes prises au talon, il la met dans
sa réserve face visible. Il peut constituer ainsi au maximum quatre colonnes,
sur chacune desquelles les cartes sont successivement posées, la nouvelle ne masquant
pas totalement la précédente, afin de pouvoir à tout moment avoir connaissance
de la nature des cartes des colonnes.
Une carte mise dans la réserve
ne peut plus en changer de place. Elle n'en sortira que pour être placée au tableau.
On ne peut jouer que la dernière carte d'une colonne, aussi est-il souvent désavantageux
de couvrir une carte par une autre plus haute.
Après avoir joué sa dernière
des quatre cartes tirées du talon, et le cas échéant tout ce qu'il a pu jouer
depuis sa réserve et son grabuge, le premier en carte passe la main à son adversaire
qui procède de la même manière. Et ainsi de suite jusqu'à l'épuisement des talons.
9.
Utilisation du grabuge comme talon
Lorsque
les cartes de son talon sont épuisées, et qu'il lui reste des cartes dans son
grabuge, après avoir joué tout ce qu'il lui était possible depuis la réserve et
le grabuge, le joueur doit utiliser les cartes du grabuge comme celle du talon,
y compris la dernière retourne non placées au tableau. A ce moment, le grabuge
perd son rôle de grabuge, et le joueur s'y sert à son tour quatre cartes qu'il
joue comme celles du talon. Quand l'ex-grabuge est composé de moins de quatre
cartes, le joueur les prend toutes.
Quand le talon est terminé, les grabuges
des deux joueurs n'ont pas obligatoirement le même nombre de cartes, et même si
un joueur n'a plus d'autres cartes que celles de sa réserve, il doit jouer celles-ci,
à son tour, si son vis-à-vis a joué une carte au tableau qui lui en donne la possibilité.
10. Les deux paquets liés au grabuge
Avant
que le grabuge soit utilisé comme talon, le premier joueur qui épuise les cartes
de son grabuge, le signale à son adversaire et compte deux paquets à son crédit.
Si par la suite, l'autre joueur épuise à son tour son grabuge, il ne compte pas
deux paquets. Il n'est pas rare qu'aucun des deux joueurs ne puisse compter ce
forfait de deux paquets.
11.
Comptage des paquets, gagnant de la partie
Lorsque
les deux joueurs ne sont plus en mesure de jouer quoi que ce soit, la partie est
terminée. On fait le compte des paquets gagnés chacun, conformément
à leurs définitions. (voir ici)
Référence
Grande
Académie des jeux réunis, Revenaz et Tabernat, s.l,
s.d. (c. 1920)
Informations
sur la page
Mise
en ligne le 19 avril 2010
Relecture le 12 novembre 2021
Auteur
: Philippe LALANNE
Le
Salon des jeux - Académie des jeux oubliés