Les
règles en français les plus anciennes du jeu de Jacquet ne
sont pas antérieures au début du XIXe siècle
la règle la plus ancienne connue date de 1818, elle se trouve en addition
au traité de Trictrac intitulé Cours complet de trictrac... de
P.M.M. Lepeintre , ce qui n'exclut pas qu'il ait pu être joué
auparavant. Cependant à partir de 1800, on peut constater par le biais
de la littérature et des représentations picturales que le Jacquet
devient la référence des jeux de tables en France, alors que le
Trictrac, jeu emblématique de l'Ancien Régime,
bien plus complexe, est en déclin. Le Trictrac s'est quasiment éteint
à la fin du XIXe siècle malgré un sursaut au cours de la
Restauration. Le Jacquet a été populaire jusque dans les années
1960. Il est semblable au Moultezim, turc, ainsi qu'au
fevga grec.
Le plateau est appelé tablier dans le sens où il contient les tables (ancien nom des dames). Le jeu de Jacquet fait ainsi partie de la famille des jeux de tables.
2. Position de départ Chaque
joueur place ses dames comme indiqué sur la figure ci-dessous :
3. Circuit des dames 4. But du jeu 5. Priorité des dés Pour
savoir quel joueur lancera les dés pour le premier coup de la partie
-
les dés posés à plat sur les dames sont bons. 7. Déplacement des dames a) Sur un coup de dé simple (les 2 dés présentent des nombres différents) on peut : - soit déplacer une dame de la valeur d'un dé et une deuxième dame de la valeur de l'autre dé ; -
soit déplacer une seule dame de la valeur d'un des deux dés, puis
depuis cette position de repos déplacer à nouveau la même
dame de la valeur du deuxième dé. Il est impératif de marquer
un bref temps de repos sur la flèche intermédiaire. b) Sur un doublet (la valeur de chacun des deux dés est la même) - on joue 4 fois la valeur d'un dé, ce qui permet de jouer de une à quatre dames ; -
si on joue avec une dame de 2 à 4 fois la valeur d'un dé, on doit
impérativement marquer une courte pause sur chaque case intermédiaire. c) « Dame touchée : dame jouée » - un joueur qui après avoir lancé les dés, s'avise à toucher au moins une de ses dames peut être forcé par l'adversaire à la jouer, si elle peut l'être d'une manière légale ; - par contre, on peut toucher une de ses dames sans être obligé de la jouer, si auparavant on a annoncé « j'adoube ! ». On ne peut cependant adouber que pour arranger ses dames mais en aucune manière pour effectuer un essai de déplacement.
Les
anciens joueurs annonçaient les doublets de la manière suivante
: 9. Obligation de jouer le dé le plus fort - si on peut jouer l'un ou l'autre des deux dés, mais pas les deux, on est tenu si possible de jouer le plus fort. C'est la raison pour laquelle, après le jet des dés, on doit annoncer les dés en commençant par le plus fort (par exemple « 4 et 2 » et non « 2 et 4 »). Notons au passage que le « 1 » ne se dit pas « un » mais « As ». -
en cas de doublet on doit jouer le plus grand nombre de points possible (tout
en restant, bien entendu, dans un multiple entier de la valeur d'un dé). 10. Déplacement de la première des quinze dames - la première des quinze dames de chaque joueur circule sur la pointe des flèches ; - lorsque cette première dame est entrée dans le dernier quadrant, elle est placée à la base de la flèche atteinte ; -
les quatorze autres dames de chaque joueur ne sont pas astreintes à circuler
sur la pointe des flèches. 11. Restriction au déplacement des dames - une dame ne peut s'arrêter ni même se reposer (c'est la raison pour laquelle on marque un temps de repos sans lacher la dame) sur une flèche occupée par au moins une dame de l'adversaire. Par contre on peut le faire sur une flèche vide ou occupée par une ou plusieurs dames de sa propre couleur ; - tant qu'un joueur n'a pas amené la première de ses quinze dames dans le dernier quadrant de son circuit, il ne peut jouer aucune de ses 14 autres dames. Cette
première dame ne portait pas de nom particulier dans les premières
règles écrites au début du XIXe siècle. Ce n'est que
plus tard, après 1850, que les joueurs lui ont donné le nom de courrier
ou plus fréquemment celui de postillon. Il s'agissait de
termes de l'argot des joueurs. 12. Sortie des dames Une fois les 15 dames entrées dans le dernier quadrant, on les sort du tablier en suivant les règles suivantes : - les contraintes des règles générales de déplacements des dames, et celle de devoir jouer le dé le plus fort sont toujours applicables ; - dans cette phase, la bande extérieure du tablier est vue comme une flèche supplémentaire ; - toute dame qui porte sur la bande extérieure par la valeur des dés (l'un ou l'autre ou la somme des deux) est sortie du tablier ; - il n'est cependant pas interdit de jouer une autre dame à l'intérieur du tablier si c'est à son avantage (en général pour gêner le passage d'une dame adverse retardée) ; - dans
le cas où la valeur d'un dé est supérieure à la position
la plus éloignée des dames par rapport à la bande extérieure,
on sort une des dames les plus éloignées (par exemple si la valeur
du dé est 5, et qu'on n'a aucune dame à une distance ni de 6, ni
de 5, on sort une dame distante de 4 ou à défaut de 3, etc.) 13. Bouchage du passage des dames de l'adversaire Lorsque
l'on occupe six flèches adjacentes, on occasionne un bouchon qui bloque
complètement la progression des dames en retard de l'adversaire.
Dans les plus anciennes règles du jeu, il n'est mentionné aucune
interdiction de bouchage. 14. Gain de la partie - le joueur qui a sorti ses 15 dames alors que son adversaire avait commencé à sortir les siennes marque 1 point ; - le joueur qui a sorti ses 15 dames alors que son adversaire n'avait pas encore commencé à sortir les siennes marque 2 points.
II. Règles avancées
Les règles suivantes ont été introduites afin d'accélérer le déroulement du jeu et lui donner un plus grand intérêt tactique.
1. Bouchages interdits - le bouchage complet (avec six cases consécutives occupées) du passage du postillon, est interdit ; - le bouchage complet du passage des autres dames de l'adversaire en occupant les six cases du premier quadrant, talon inclus, est interdit tant que l'on n'a pas réussi à amener au moins une de ses propres dames sur la dernière flèche du dernier quadrant du circuit, et même, mais cela doit faire l'objet d'une convention entre les deux joueurs avant de débuter le jeu, une autre dame sur l'avant-dernière flèche. Notons que J. Léchalet (voir références en bas de page) recommande fortement l'adoption de cette option afin de favoriser une meilleure dynamique du jeu.
- on suit les mêmes règles que dans la version d'origine mais les dames au lieu d'être mises à l'extérieur du tablier sont rangées sur la case de départ de l'adversaire (emplacement de son talon) ; - il en résulte que tant que l'adversaire aura laissé une seule de ses dames sur son talon, on ne pourra sortir aucune dame, même si elle porte sur la bande latérale qui n'est plus considérée comme une case supplémentaire pour la sortie des dames ; - lors de ce blocage, il arrive que l'on soit dans l'incapacité de jouer les dés amenés. On passe alors son tour, comme pour tout blocage.
Le joueur qui a sorti le premier ses 15 dames gagne : - 1 point si son adversaire avait commencé à sortir au moins une de ses dames ; Mais si l'adversaire avait commencé à sortir ses dames : - 2 points, s'il a toutes ses dames dans son quatrième quadrant ; - 3 points, s'il a encore des dames dans son troisième quadrant, mais ni dans le deuxième ni dans le premier ; - 4 points, s'il a encore des dames dans son deuxième quadrant, mais pas dans le premier ; - 5
points, s'il a encore des dames dans son premier quadrant (celui de son talon). Ce système permet de préserver l'intérêt du jeu jusqu'au bout par la possibilité pour le perdant de minimiser ses pertes. On peut cependant s'en tenir au système initial limité au gain d'une partie simple ou double. Dans l'argot des joueurs, les dames non sorties par le perdant étaient appelées les petits cochons. III.
Le Moultezim Ce jeu de table turc portant le nom donné jadis en Turquie aux collecteurs, le plus souvent usuriers, d'impôts fonciers, ressemble fortement au jeu de Jacquet. Il n'en diffère que par les deux points qui suivent.
Au Jacquet, elle doit avoir atteint le quatrième quadrant avant que l'on puisse jouer les autres dames. Au Moultezim, cette même dame doit seulement atteindre le troisième quadrant pour que les autres dames puissent être jouer.
Au Jacquet moderne, ce bouchage est conditionnel (une dame amenée sur la dernière case et, optionnellement, une autre sur l'avant-dernière case). Au Moultezim, le bouchage dans le premier quadrant est toujours interdit (on doit laisser en permanence une de ses six premières cases libre pour le passage des dames adverses). Références P.M.
Lepeintre, Cours complet de Trictrac avec un abrégé du Gammon,
du Jacquet et du Garanguet, chez Guillaume, Paris, 1818. Informations sur la page Mise
en ligne le 19 août 2003 Auteur : Philippe LALANNE Le Salon des jeux - Académie des jeux oubliés
|