Le jeu de l'Hombre joué en France principalement durant la seconde moitié du XVIIe et le début du XVIIIe siècle était un jeu d'argent utilisant un système complexe de mises, dettes et paiements entre joueurs. Jeu d'enchères, il ne présentait seulement que deux contrats possibles, ce qui pouvait entraîner de fréquents coups non joués quand aucun des joueurs ne souhaitait s'engager sur l'un ou l'autre des contrats par une trop grande crainte de perdre. Pourtant le jeu de l'Hombre ne manquait pas de potentiel. Donné pour avoir été le premier jeu de levées à enchères sur contrats de l'histoire des jeux de cartes, il peut à ce titre être considéré comme l'ancêtre du Bridge. Au Danemark, depuis le XIXe siècle, le jeu de l'Hombre a été adopté avec l'ajout de plusieurs contrats. Aujourd'hui, les joueurs danois ont fait du jeu de l'Hombre un jeu de compétition en le débarrassant de l'aspect financier par la suppression des mises, dettes, et paiements entre joueurs. Le nombre des contrats est passé de deux à neuf, diminuant ainsi le nombre de coups non joués. Le jeu se joue aux points et de préférence en duplicate à l'instar du Bridge. Les clubs de ce jeu de l'Hombre sont relativement nombreux et affiliés à la fédération danoise Dansk L'hombre-Union. Il est cependant à noter que cette manière de jouer à l'Hombre sans poule enlève une composante importante du jeu initial qui consiste pour celui qui a remporté les enchères à pouvoir plus aisément diviser ses deux opposants.
1. Nombre de joueurs et jeu de cartes
Le jeu de l'hombre se joue ŕ trois, avec un jeu de 40 cartes obtenu ŕ partir d’un jeu de 52 cartes dont on a retiré les dix, les neuf et les huit.
Cartes
rouges en ordre décroissant :
Cartes noires en ordre décroissant : R, D, V, 7, 6, 5, 4, 3, 2
On constate deux choses : en rouge, l'ordre des petites cartes est inversé, et en noir, l'as est absent.
La raison de la disparition des as noirs de l'ordre naturel par naturel on entend hors atout sera expliquée dans le chapitre suivant. Quant à l'inversion de l'ordre des petites cartes en rouge, il est purement arbitraire pour s'en souvenir il suffit de noter que l'as rouge vient après le valet, les petites le suivant dans l'ordre 2, 3, 4, 5, 6, 7, faisant ainsi du 7 la plus petite carte en rouge.
La couleur des atouts est choisie par un des joueurs après un système d'enchères. Suivant la couleur choisie, l'ordre des cartes subit un changement par rapport à l'ordre naturel.
Indépendamment de la couleur choisie, les as noirs sont toujours atouts.
Deux cartes sont toujours atouts : l'as de pique, nommé espadille, et l'as de trèfle, nommé baste. C'est la raison pour laquelle, les as noirs n'existent pas dans l'ordre naturel.
L'espadille est le plus fort atout et la baste, le troisième.
Le deuxième atout qui se place entre l'espadille et la baste se nomme la manille. Lorsqu'une couleur est choisie pour atout, la plus petite carte dans l'ordre naturel de cette couleur, devient la manille. Ainsi, si l'atout est cur ou carreau, la manille sera le sept, et s'il est pique ou trèfle, elle sera le deux.
Ces trois atouts (espadille, manille et baste) sont nommés les matadors.
Sous certaines conditions, les matadors bénéficient de privilèges qui serons détaillés dans les règles du jeu de la carte.
Lorsque l'atout choisi est rouge (cur ou carreau) l'as correspondant quitte sa place derrière le valet pour passer devant le roi.
Cet as devient donc le quatrième atout, derrière les trois matadors. L'as ainsi promu prend le nom de ponte.
En couleur rouge, atouts en ordre décroissant : [E, 7, B], A, R, D, V, 2, 3, 4, 5, 6
En couleur noire, atouts en ordre décroissant : [E, 2, B], R, D, V, 7, 6, 5, 4, 3
On voit que du fait de la présence du ponte, il y a 12 atouts en rouge, alors qu'en noir il n'y en a que 11.
Le
positionnement des joueurs autour de la table se fait en tirant
trois cartes du jeu un roi, une dame et un valet
qu'un joueur présente à choisir aux deux autres en éventail
faces cachées. Celui qui tire le roi choisit sa place, celui qui a la dame
s'assied à sa droite, et celui qui a le valet à sa gauche.
Le
premier donneur est le joueur ayant tiré le roi. Il prend le jeu de quarante
cartes, le mélange, le fait couper à son voisin de gauche, puis
donne à chaque joueur neuf cartes, trois par trois. La distribution, comme
les enchères et le jeu, se fait dans le sens des aiguilles d'une montre.
Les trois joueurs étant servis, le donneur place les treize cartes restantes
à sa droite; elles forment le talon.
Le premier en cartes est le joueur placé à la droite du donneur.
Un coup est l'espace de temps entre deux donnes. Un même joueur ne peut donner deux fois consécutivement. Le premier en cartes du coup qui vient de se terminer, devient le donneur du coup suivant.
La
durée d'une partie est fixée à trente coups, donc dix donnes
par joueurs.
Le jeu de l'hombre est un jeu de levées. Le gagnant d'un coup est celui qui a fait le plus grand nombre de levées sur les neuf possibles. Pour faire une levée, il faut avoir mis une carte plus forte que celles posées par les deux autres joueurs en suivant les règles du chapitre suivant.
Pendant toute la durée d'un coup, le joueur venant de faire une levée joue en premier pour la prochaine levée on dit qu'il a la main.
On est tenu de jouer de la couleur demandée par le premier en cartes pour la première levée, ou celui qui a la main pour les levées suivantes.
Si l'on ne possède pas de la couleur demandée, on n'est pas obligé de couper avec un atout.
Il n'y a pas obligation de monter en quelque couleur que se soit, y compris en atout.
Si le premier a joué un atout, autre qu'un des trois matadors, les suivants doivent en fournir mais ils ne sont pas obligés de jouer un matador, même s'ils ne possèdent pas d'autres atouts.
Si le premier joue un matador, les autres doivent obligatoirement jouer de l'atout s'ils en possèdent. Ils peuvent jouer un matador s'ils le souhaitent, mais rien ne les y oblige, à une exception près : ils ne sont tenus de jouer un matador que si le premier en a joué un plus fort que celui qu'ils possèdent et s'ils sont démunis d'autres atouts les matadors les plus forts, joués par le premier, forcent uniquement les plus faibles s'ils sont seuls en main. Par suite, si le premier joue la manille et que l'un des suivants possèdent seulement les deux autres matadors, celui-ci ne sera pas obligé de jouer sa baste, mais alors il devra prendre de son espadille, et s'il ne le fait pas, il devra alors jouer sa baste qui est forcée par la manille. Si un matador n'est pas forcé, et que l'on n'a pas d'autres atouts, on peut se défausser de n'importe quelle carte pour le conserver. Un matador joué par le deuxième ne force pas les plus faibles du troisième. La baste, étant le plus petit matador, ne peut jamais forcer les deux autres.
Tout joueur, lorsque c'est à son tour d'avancer une carte, a le droit de tourner ses levées, ainsi que celles des deux autres, pour les examiner, mais en dehors de son tour, il n'est pas autorisé à le faire. Il est bon de ne pas abuser de ce privilège pour la fluidité du jeu.
Après
chaque donne débutent les enchères entre les joueurs, sur la base
de contrats bien définis. Le joueur qui gagne les enchères est nommé
l'hombre, les deux autres sont les tiers.
Les deux tiers jouent en équipe contre l'hombre, mais ils conservent chacun leurs levées et doivent tenir le silence.
Seul
l'hombre peut gagner des points ou en perdre. Le nombre de points est lié
au contrat que l'hombre s'est engagé à tenir.
Le
jeu de l'Hombre est un jeu de levées. A la fin d'un coup, en fonction du
nombre de levées réalisées, l'hombre peut gagner,
perdre remise ou codille. Il peut aussi faire la vole ou
la manquer.
Gagné : l'hombre est celui des joueurs qui a fait le plus de levées, ce qui est réalisé lorsqu'il fait cinq levées sur les neuf possibles, ou bien quatre levées quand un tiers en fait trois et l'autre deux.
Remise : l'hombre perd remise s'il fait le même nombre de levées que le tiers qui en a fait le plus, ce qui arrive lorsqu'il fait quatre levées et un tiers en fait aussi quatre, ou bien quand l'hombre et chacun des deux tiers font trois levées.
Codille : l'hombre perd codille si un tiers fait plus de levées que lui.
Vole : lorsque l'hombre a fait cinq levées, il a gagné et il peut en rester là, mais s'il joue une sixième carte, il s'engage implicitement à faire la vole. Dans ce cas, si l'hombre fait les neuf levées, il gagne la vole; s'il ne les fait pas il la manque. Manquer la vole n'enlève pas à l'hombre le bénéfice d'avoir gagné, mais lui fait perdre un point. Réussir la vole fait gagner un point supplémentaire à l'hombre. La vole est équivalent au grand chelem du Bridge.
Les contrats sont au nombre de neuf classés en deux familles :
A
: les deux gandes familles de contrats. B
: les différents contrats. C
: points marqués par l'hombre s'il gagne, ou qu'il décompte
s'il perd remise. D
: points que décompte l'hombre s'il perd codille.
Demande : quand l'hombre emporte ce contrat aux enchères, il peut choisir parmi l'un quelconque des contrats avec écart à l'exception du Grand Tourné. S'il conserve la demande, il annonce la couleur d'atout et écarte obligatoirement entre une et toutes ses cartes puis il complète sa main avec le même nombre de cartes prises du dessus du talon. Le joueur à sa droite peut ensuite écarter à son tour le nombre de cartes qu'il veut suivant ce qu'il reste au talon, puis le dernier joueur en fait de même s'il reste au moins une carte au talon. Lorsqu'on fait son écart on doit en annoncer le nombre.
Demande à Pique : l'atout est pique, l'hombre et les tiers écartent comme en demande.
Tourné : l'hombre retourne la première carte du talon; la couleur de cette carte est l'atout. L'hombre est tenu d'écarter au moins deux cartes, il prend pour lui la retourne et la, ou les, cartes suivantes nécessaires à compléter sa main. Les tiers font de même qu'en demande.
Nolo en demande : l'hombre s'engage à ne faire aucune levée et il n'y a pas d'atout. Il fait son écart comme en demande (généralement il n'en change qu'une) et les tiers n'ont pas le droit d'écarter. Si l'hombre ne fait aucune levée, il gagne ; s'il fait une seule levée, il perd remise ; dès qu'il a fait deux levées, il a perdu codille. La vole bien sûr n'est pas applicable.
Grand tourné : identique au tourné, mais pour pouvoir choisir ce contrat l'hombre doit avoir en main l'espadille et la baste. L'hombre montre l'espadille et la baste et pratique comme pour un simple tourné.
Possibilité d'abandon : après avoir fait son écart et vu sa rentrée, l'hombre est libre d'abandonner au plus tard avant de jouer sa première carte, perdant alors remise. Cette manière de faire lui permet d'éviter de perdre codille. L'abandon n'est possible que pour les contrats en écartant à l'exclusion du Nolo en demande.
Nota 1 : les cinq contrats en écartant sont classés dans le tableau, de gauche à droite, du plus faible au plus fort. Nota 2 : Tourné et Nolo en demande sont deux contrats de même rang de sorte qu'on ne peut pas monter sur un Tourné par un Nolo en demande, ni sur un Nolo en demande par un Tourné.
Sans prendre : quand l'hombre emporte ce contrat aux enchères, il peut choisir entre Sans prendre ou Sans prendre à Pique. S'il conserve le Sans prendre, il annonce la couleur d'atout qui doit être différente de pique. Les tiers font leurs écarts comme en demande.
Sans prendre à pique : l'atout est pique, les tiers écartent comme en demande.
Pur nolo : l'hombre s'engage à ne faire aucune levée et il n'y a pas d'atout. Personne n'a le droit d'écarter. Si l'hombre ne fait aucune levée, il gagne ; s'il fait une seule levée, il perd remise ; dès qu'il a fait deux levées, il a perdu codille. La vole bien sûr n'est pas applicable.
Nolo ouvert : identique au Pur nolo mais l'hombre joue en découvrant son jeu.
Nota
1 : Sans
prendre à pique et Pur nolo sont deux contrats de même
rang de sorte qu'on ne peut pas monter sur un Sans
prendre à Pique par un Pur
Nolo, et inversement. Nota 2 : les contrats sans écarter sont plus forts que les contrats en écartant.
Les contrats nolo, en demande ou pur, consistent pour l'hombre à ne faire aucune levée. Ils sont joués sans atout.
Comme les contrats nolo sont joués sans atout, les matadors n'y existent plus, et les as noirs deviennent les plus petites cartes de leurs couleurs. Il n'y a plus ni ponte, ni manille.
Ordre des cartes rouges en nolo : R, D, V, A, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Ordre des cartes noires en nolo : R, D, V, 7, 6, 5, 4, 3, 2, A
Le but des enchères est de désigner le joueur qui sera l'hombre et jouera contre les deux tiers.
Pour emporter les enchères et devenir ainsi l'hombre pour le coup, il faut annoncer le contrat le plus haut placé de ceux annoncés par l'ensemble des trois joueurs.
La donne étant faite, chaque joueur prend connaissance de ses neuf cartes, et le premier en carte annonce son contrat ou bien passe.
Un joueur qui passe ne peut plus participer aux enchères.
Les enchères se font d'abord entre le premier en cartes et le second joueur. Lorsqu'un seul des deux premiers joueurs a passé, les enchères se poursuivent entre celui des deux premiers ayant tenu et le troisième joueur. De ces deux derniers joueurs celui qui ne passera pas sera l'hombre.
Lorsque les deux premiers joueurs ont passé, le troisième joueur peut choisir son contrat et devenir l'hombre, mais il peut aussi passer à son tour. Dans le cas où les trois joueurs ont passé, le coup ne se joue pas et le premier en cartes devient le donneur pour le coup suivant. Le coup qui n'a pas été joué compte dans le nombre des coups de la partie, c'est à dire qu'il fait partie des trente coups.
Lorsque deux joueurs enchérissent l'un contre l'autre, le premier à parler détient le droit de simplement égaliser sur le second afin obtenir le contrat, alors que le second joueur doit impérativement monter sur le choix du premier pour pouvoir l'emporter.
On a vu que les contrats en écartant et ceux sans écarter comportent deux contrats de rang identique. En application du droit de la primauté, si le second joueur annonce un des deux contrats de même rang, le premier joueur peut répondre en choisissant entre le même contrat ou l'autre de même rang. Par contre, si le premier annonce un des deux contrats de même rang, le second joueur doit impérativement annoncer un contrat de rang supérieur ou bien passer.
Exemple : Soit trois joueurs A, B, C, où A est le premier en cartes et C, le donneur.
B annonce Demande C monte avec Nolo en demande (il est obligé de monter ou passer) B égalise avec Tourné (B tire le bénéfice de la primauté en égalisant par Tourné, il aurait pu égaliser par Nolo en demande ou bien monter ou passer) C passe A et C ayant passé, B est l'hombre avec le contrat Tourné.
B Demande à pique A Tourné B Passe Enchères entre A et C C Nolo en demande A Passe
A et B ayant passé, C est l'hombre avec un contrat Nolo en demande.
A Demande B Tourné A Passe Enchères entre B et C C Pur Nolo B Sans prendre à pique C Passe
A et C ayant passé, B qui a profité de la primauté est l'hombre avec un contrat Sans prendre à Pique.
A Demande B Passe C
Passe
Remarque : Le premier joueur à ne pas passer, et qui n'est pas le dernier, a intérêt à annoncer simplement demande, la primauté lui permettant d'égaliser sur le contrat du joueur suivant.
Il est possible de jouer à l'hombre à quatre joueurs, mais seulement trois joueurs sont actifs.
Le quatrième joueur est toujours celui placé en face du donneur.
Chacun des quatre joueurs devient le quatrième un coup sur quatre.
Le premier rôle du quatrième joueur est, au premier coup, de placer un deuxième jeu de quarante cartes à sa gauche, et aux coups suivants le nouveau quatrième joueur fait le ménage des cartes utilisées et les placent en tas à sa gauche. Ainsi dans les deux cas, le prochain donneur a toujours un jeu prêt à sa droite.
La deuxième fonction du quatrième joueur est de tenir à jour la fiche de marquage des scores. Il ne doit en rien interférer dans le jeu des trois joueurs actifs.
La partie se joue en quarante coups afin de compenser l'inactivité d'un joueur à chaque coup. A la fin de la partie, chacun des joueurs aura joué trente coups comme au jeu à trois joueurs.
APPELLATION DES CONTRATS
1.
Les contrats au Danemark et la traduction en français
Spil (Jeu)
Bedre spil (Meilleur jeu) : Demande à Pique
Tourné (Tourné) : Tourné
Křbe Nolo (Nolo avec achat) : Nolo en demande
Tourné-Respekt (Tourné-Respet) : Grand Tourné
Solo (Seul) : Sans prendre (pour rester conforme au jeu de l'hombre du XVIIe et XVIIIe siècle)
Solo Spar (Pique seul) : Sans prendre à pique
Ren Nolo (Nolo pur) : Pur Nolo
Nolo Ouvert (Nolo ouvert) : Nolo ouvert
Tout (Tout) : Vole (pour rester conforme au jeu de l'Hombre du XVIIe et XVIIIe siècle)
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