L'Ambigu est un jeu de cartes qui était en vogue sous Louis XIV. Jeu de renvis (relances), il se distingue des autres jeux de ce type, comme la Prime, le Hoc Mazarin ou encore le Poque, le Brelan et plus tard la Bouillotte par le fait que les enchères se font non plus sur un seul type de combinaison à la fois mais sur une gamme de combinaisons hiérarchisées. C'est cet assemblage des combinaisons sur les mêmes enchères qui a fait donner le nom d'Ambigu au jeu (il a aussi porté celui de Mêlé). Bien que joué avec 40 cartes au lieu de 52 pour le Poker (apparu au XIXe siècle), et avec une main de 4 cartes au lieu de 5 (de fait les combinaisons des deux jeux ne peuvent être les mêmes), cette hiérarchisation des combinaisons incluant des simples et d'autres composées, fait de l'Ambigu le jeu le plus proche du Poker. De plus la possibilité d'échanger des cartes entre deux phases du jeu ne manque pas de faire penser au Poker fermé. Si certains voient dans le Poque le jeu de renvis le plus proche du Poker, il est bon de constater qu'il ne fait intervenir qu'un type de combinaison (paire, brelan, carré) ; seul le nombre de cartes en main qui est le même (5 cartes) et le verbe poquer, signifiant, entre autres, miser (on poque de tant de jetons) peut le rapprocher du Poker (ce qui est peu, même si le terme a pu être emprunté au Poque). Un autre jeu, la Bouillotte (successeur du Brelan), est à mettre au crédit concernant les possibles inspirations du Poker. La Bouillotte a en effet, avant le Poker, introduit la notion de blind (petite et grosse) sous les appellations carre et surcarre. Alors si l'on passe l'Ambigu à 52 cartes avec les combinaisons du Poker, et que l'on utilise la carre et la surcarre de la Bouillotte, on arrive peu ou prou au Poker, sauf que l'Ambigu incite davantage les joueurs à chercher la plus haute combinaison possible qui est davantage rémunératrice que les plus basses (comme au Poker des machines à sous).
Origine du nom Dans sa préface de la règle de l'Ambigu contenue dans La Maison académique des jeux (1702), l'auteur qui se dit être « le très humble et très affectionné P.P.B. de Mme la comtesse de V. », explique avoir reçu de la part d'un seigneur Esclavon la règle d'un jeu de cartes appelé, en langue slavonne, Prispistrihoc, lequel il préféra appeler en français l'Ambigu ou le Meslé. Cette origine affichée semble être tout à fait imaginaire, cependant il est intéressant d'essayer de trouver ce qu'aurait pu être la signification de Prispistrihoc dans une langue slave. Ne connaissant en rien les langues slaves, faute de mieux j'ai utilisé Google Traduction pour tenter de retrouver la sonorité Prispistrihoc. Ainsi par exemple, en slovaque, prispiet trikrát qui est traduit par « contribuer trois fois » répond assez bien à cette recherche, ce qui ne serait pas illogique puisque l'Ambigu se joue en trois phases au terme desquelles les joueurs les plus intrépides sont amenés à renvier. Devant d'une part le fait que le jeu est un assemblage de plusieurs autres, comme la Prime ou le Brelan, et d'autre part le constat que le gain n'est vraiment jamais acquis que l'on ait atteint la fin de la partie, l'auteur a préféré lui donner deux noms en rapport : le Mêlé, et l'Ambigu. C'est ce dernier qui a prévalu.
Règles du jeu
1. Nombre de joueurs et jeu de cartes L'Ambigu se joue de 2 à 6 joueurs avec un jeu de 40 cartes obtenu en retirant les 12 figures d'un jeu de 52 cartes. Ainsi, seules les cartes numérotées de 1 à 10 sont utilisées.
Avant de commencer un coup, chacun des joueurs doit placer au milieu de la table 1 ou 2 jetons (selon convention) pour pouvoir participer. Il s'agit de l'ante. À celle-ci viendront s'ajouter d'autres jetons pour constituer la poule. Si après un coup la poule n'a pas été tirée, l'ante est tout de même due pour le coup suivant.
Au début du jeu chaque joueur débute avec une somme convenue de jetons qui constitue ce que l'on appelle la cave et qui est la même pour tous les joueurs. Lorsqu'un joueur n'a plus de jetons dans sa cave, on dit qu'il est décavé. Un joueur décavé peut reprendre des jetons sous certaines conditions ; on dit qu'il se recave.
La
donne et la parole se font à tour de rôle dans le sens inverse des
aiguilles d'une montre.
Chacun
regarde son jeu et estime ses chances de gagner. Le premier tour de parole commence
par le joueur assis à la droite du donneur. Deux possibilités s'offrent
aux joueurs : passer la parole à son voisin de droite, ou demander au donneur
de battre immédiatement les cartes du talon pour distribuer 2 cartes supplémentaires
aux joueurs, toujours une par une, afin qu'ils en aient 4 en main. Le joueur qui demande de battre doit immédiatement placer une mise convenue - un ou deux jetons - dans un plateau ou corbillon réservé à la batterie. On appelle batterie les jetons placés dans ce plateau pour signifier que ces mises sont associées à la demande de battre les cartes.
Après
avoir battu les cartes, sans les mélanger au préalable, le donneur
distribue 2 cartes supplémentaires, une par une, à chacun des joueurs.
Tous les joueurs ont désormais 4 cartes en main. Chacun regarde son jeu
et estime à nouveau ses chances de gagner. La deuxième phase ne
peut comporter qu'au maximum deux tours de parole. Si lors du premier tour de parole tous les joueurs avant le donneur ont passé, celui-ci a la possibilité de forcer tout le monde à conserver les cartes qu'ils ont en main pour passer à la dernière phase du jeu. Pour cela le donneur doit mettre 2 jetons au jeu sans dire « va de 2 jetons ». Dans le même cas si le donneur ne veut pas forcer le jeu, il peut à son tour passer et le coup s'arrête immédiatement. Tous les jetons précédemment joués restent pour le coup suivant.
Cependant, si lors du premier tour de parole, un joueur y compris le donneur,
estimant que c'est son intérêt, décide d'ouvrir, il doit mettre
devant lui de 2 à 4 jetons selon ce qu'il désire, en annonçant
« va de 2 (3 ou 4) jetons ». On appelle vade le montant
en jetons de l'ouverture. Dès qu'un joueur a ainsi fait la vade, les suivants,
jusqu'au joueur qui se trouve à gauche de celui qui a fait la vade (ouvert),
ont deux options : passer ou suivre. Si un joueur passe, il pose ses cartes
devant lui, faces cachées, et il ne participe plus au jeu (au Poker on
dirait qu'il se couche). Si un joueur suit, il avance devant lui la même
somme que la vade. Dans cette phase du jeu, après une vade il n'y a jamais
de renvi (on ne peut pas proposer plus que le montant de la vade : on suit
ou on se retire).
Les
joueurs restant en jeu ont donc leurs 4 cartes définitives en main. Quand un joueur a ouvert, les joueurs qui suivent y compris ceux qui ont passé avant lui peuvent passer, suivre ou renvier. Si un joueur passe après la vade, il se couche et ne peut plus participer ; si un joueur suit, il avance devant lui le même montant que la vade et reste au jeu ; si un joueur renvie il doit avancer une somme supérieure à la vade. Un renvi débute un nouveau tour de parole entre les joueurs qui n'ont pas passé après la vade (on peut passer avant la vade et participer aux enchères qui suivent, mais si l'on passe après la vade on ne peut plus revenir au jeu). Les
tours de parole s'arrêtent lorsque plus aucun joueur ne renvie.
Pour
gagner à l'Ambigu, il faut, soit être le seul à rester en
jeu, soit avoir la meilleure des combinaisons des joueurs encore en jeu lorsque
plus aucun ne renvie. Les combinaisons peuvent être simples ou composées,
et sont classées en ordre hiérarchique. Les deux chapitres suivants font état de la hièrarchie des combinaisons (la séquence est toujours plus forte que la prime) et de la valeur en jetons de chacunes d'entre elles.
Le
point... [1 jeton]
Le
tricon avec prime (brelan + prime)... [4+2 ou 4+3 jetons soit 6 ou 7 jetons
selon que la prime est petite ou grande]
Durée de la partie : Elle est fixée d'un commun accord par les joueurs avant de commencer. Lorsque le temps est écoulé, on termine juste le coup en cours. Pendant la durée de la partie, seul un joueur décavé peut se retirer. Temps
pour recaver : Lorsqu'un coup est terminé, un joueur qui pense
n'avoir pas assez de jetons dans sa cave peut en reprendre autant qu'il veut,
mais il doit impérativement le faire avant que la troisième carte
lui soit donnée (fin de la première phase du coup suivant).
Manque de jetons pour payer le prix de la combinaison au gagnant :
Dans ce cas, le joueur concerné reste redevable de ladite somme au gagnant. Dispense
de donner son écart pour en faire un nouveau talon : Si un joueur
s'aperçoit que le talon initial sera insuffisant pour servir les joueurs
qui vont écarter, il est autorisé à refuser de mêler
son écart au talon. Références Académie
universelle des jeux, Legras, Paris,
1730 Informations sur la page Mise
en ligne le 6 avril 2010 |